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Avec son savoir-faire unique en robotique, le laboratoire ISIR entend attirer de plus en plus d’industriels

ISIR

par Equip'Prod

Installés sur le campus parisien Pierre et Marie Curie, les quelque 140 chercheurs du laboratoire hautement technologique ISIR travaillent sur de nombreux projets de recherche fondamentale et appliquée en robotique. Le plus grand laboratoire 100% robotique de France réalise notamment de nombreuses applications médicales en intégrant les sciences cognitives pour mieux comprendre l’humain. Un savoir-faire hors du commun qui devrait intéresser un nombre croissant d’industriels.  

Ludovic Saint-Bauzel

Maître de conférence en informatique pour la robotique au sein de Sorbonne Université et responsable du parcours « Mechatronic Systems for Rehabilitation » du Master Ingénierie pour la Santé, -Ludovic Saint-Bauzel est également chercheur au sein de l’Institut des systèmes intelligents et de robotique (ISIR)

Équip’Prod :

Présentez-nous l’ISIR en quelques mots…

Ludovic Saint-Bauzel : Il s’agit d’un laboratoire de recherche créé en 2007 et rattaché à Sorbonne Université et au CNRS ; il comprend 141 personnes dont 54 enseignants-chercheurs/chercheurs-personnels technique administratif, 66 doctorants et 21 post-doctorants. Multidisciplinaire, le laboratoire se compose de cinq équipes : Agathe pour les applications médicales (assistance aux interventions médico-chirurgicales et l’assistance aux personnes souffrant d’un déficit moteur), Amac (modèles des fonctions perceptives, cognitives et motrices), Interactions Multi-Échelles (développement de dispositifs matériels et de logiciels pour faciliter les interfaces homme-machine), à laquelle est associée l’équipe PIRoS (traitement du signal dans le cadre de l’analyse de comportements sociaux), et enfin Syroco : cette équipe se concentre sur le développement de méthodes de conception et de contrôle pour les systèmes robotiques et de manipulation mobile dans des environnements complexes.

Qu’est-ce qui fait la force de votre laboratoire ?

>> L’ISIR est tout particulièrement spécialisé dans le secteur du médical mais pas seulement
puisqu’il couvre toutes sortes d’industries. (©CNRS)

Avant tout, l’ISIR est le plus vaste laboratoire exclusivement consacré à la robotique de France. Ensuite, celui-ci est composé de chercheurs issus de différentes disciplines des sciences de l’ingénieur et des sciences de la vie, lui permettant de couvrir un large spectre de compétences dans des domaines très variés comme la mécanique des systèmes, l’informatique, l’intelligence artificielle ou encore les neurosciences. Ces diverses compétences s’associent autour de projets de recherche organisés par l’une des cinq équipes de chercheurs citées précédemment, chacune travaillant sur un champ d’action spécifique. 

Notons par ailleurs que les enseignants-chercheurs de l’ISIR sont à l’origine du diplôme d’ingénieur en robotique délivré par Polytech Sorbonne, reconnu par l’État et la Commission des Titres d’Ingénieurs, et qui s’est aujourd’hui répandu dans d’autres écoles d’ingénieur. 

Pour quelles raisons les industriels vous sollicitent-ils ?

>> Avec les industriels, l’ISIR travaille à deux niveaux : la réalisation de prototypes et la validation de performances de leurs robots. (©CNRS)

Nous travaillons avec des acteurs industriels dans plusieurs domaines. Le premier concerne la réalisation de prototypes de robots et de bancs d’essais. Le second porte sur la validation de performances de leurs robots. L’ISIR assure également depuis deux ans des formations, en particulier pour les ingénieurs souhaitant renforcer leurs compétences en robotique, comme ce fut le cas récemment pour GE.

Nous proposons ainsi aux industriels une expertise forte et les accompagnons du début de l’étude au prototypage. Par ailleurs, notre statut de laboratoire académique nous procure une entière indépendance : nous n’avons pas de mal à dire à certaines entreprises qu’il n’est parfois pas nécessaire d’automatiser telle ou telle ligne de production ou d’y ajouter des systèmes susceptibles de venir perturber un process déjà performant. 

Enfin, nous avons notamment travaillé avec le CEA et le fabricant ­Haption ou encore avec la société Koelis avec qui nous avons développé une solution robotisée permettant de mener des écho-graphies intelligentes, ou encore sur des projets tels que Gema-life, un robot d’assistance à la marche et la mobilité des personnes âgées.

>> L’ISIR propose aux entreprises industrielles une expertise forte et les accompagne du début de l’étude au prototypage. ©CNRS

Quelle est l’actualité du laboratoire ?

Elle est multiple, même si pour le moment, le Covid-19 est une vraie souffrance pour les activités de recherche, en particulier les travaux menés sur les relations entre les robots et l’humain. Néanmoins, au sein de l’équipe Agathe à laquelle j’appartiens et dont les recherches portent sur la conception et la commande de dispositifs robotiques pour l’assistance aux gestes et mouvements humains, nous avons réalisé une avancée majeure en comprenant d’où vient la transmission de la confiance. Plus exactement, nous avons réussi à montrer que la kinesthésie (la combinaison du mouvement et de la force) permet de transmettre la confiance ; pour l’industrie, cette découverte permettra de mettre au point une nouvelle façon de programmer les machines, d’améliorer considérablement les signaux d’alerte et, pour les utilisateurs, de mieux comprendre l’origine d’un problème sur une ligne de production. 

Quelles sont vos actions à venir ?

Outre la rentrée scolaire qui s’organise autour des règles sanitaires en vigueur, nous continuons pour l’industrie d’améliorer les interfaces machine en attente de scénario d’application ; ainsi, de nombreux industriels devraient être intéressés par des travaux de recherche portant sur la coopération hommes / machines, en particulier dans les domaines de l’usinage et du soudage. Car aujourd’hui, les nombreuses avancées nous permettent de travailler avec une bien meilleure compréhension des comportements humains et cognitif pour des applications de co-manipulation ou tout simplement pour mieux comprendre des machines de plus en plus complexes. 

EQUIPPROD • N°122 Septembre 2020