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Une gamme et une stratégie d’usinage repensées pour améliorer la production au sein du Groupe Lépine

MMC METAL FRANCE / GROUPE LÉPINE

par Equip'Prod

Afin d’optimiser l’usinage de têtes de prothèses fémorales, l’usine d’Orthez (Pyrénées Atlantiques) du Groupe Lépine a choisi de repenser entièrement la production de ces pièces complexes avec une solution complète du carburier Mitsubishi Materials. Pleinement impliqué dans ce projet, le carburier a pris part au process en menant de nombreux essais afin de trouver les meilleures stratégies d’usinage.

>> Vue d’une partie de l’atelier d’usinage, essentiellement composé de machines Mazak


>> De gauche à droite : Grégory Lafon, Nicolas Bruneau, Valérie Denis-Lutard (cheffe de projet Groupe Lépine), Benjamin Amodeo et Julien Legland

Malgré la crise du Covid-19 qui a brutalement frappé la quasi totalité de l’industrie, le secteur du médical apparaît comme l’un des rares rescapés. Mais cette résilience, voire croissance dans certains cas, n’a pas profité qu’à quelques groupes pharmaceutiques ; le domaine des implants et des ancillaires (ces instruments destinés aux chirurgiens) a également été porté par des vents favorables… et le Groupe Lépine, entreprise familiale lyonnaise (dont le siège social est situé à Genay) de 500 personnes, en est le parfait exemple. « Pour nous, la croissance et l’activité ne se sont jamais arrêtées mais uniquement ralenties. C’est pourquoi, l’un de nos grands projets d’évolution de la production de l’un de nos îlots dédiés aux têtes fémorales a pu aboutir », affirme Benjamin Amodeo, responsable Méthodes Industrialisation au sein de l’usine d’Orthez (à une cinquantaine de kilomètres de Pau) ; ce site de production de soixante-treize personnes est l’un des deux plus importants du groupe.

Combiner croissance, qualité et normes, une équation compliquée pour la production

>> Opération d’usinage de la tête fémorale

L’objectif de ce projet était le suivant : automatiser au maximum l’îlot de fabrication de têtes fémorales de prothèse afin de rendre plus disponibles les opérateurs et répondre de façon plus réactive aux demandes croissantes dans ce domaine des pièces chirurgicales. « Nous avions la volonté de renouveler le parc machines de cette unité et remplacer nos tours pour acquérir une machine bi-broche équipée d’un embarreur et d’un système automatisé de convoyage de pièces, détaille Benjamin Amodeo. Mais au-delà de la machine, nous en avons profité pour repenser complètement l’industrialisation ».

Celle-ci est passée par l’étape des outils coupants. « Le problème est que dans le secteur du médical, fortement soumis à la réglementation, on ne change pas d’outil et de méthodes de production aussi facilement car les produits doivent être validés par les organismes notifiés ainsi que par nos clients qui demeurent les utilisateurs finaux, rappelle Nicolas Bruneau, directeur Industriel multi-sites du groupe (intervenant à la fois sur les sites d’Orthez et de Genay). D’ailleurs, nous développons ces produits en collaboration avec des chirurgiens partenaires ».

Dans le cas de cette évolution pour la production de têtes fémorales (une prothèse étant composée d’une tête et d’une tige que l’on vient ensuite assembler), le Groupe Lépine a choisi de donner carte blanche à une poignée de carburiers triés sur le volet mais, très vite, avec l’impossibilité pour les uns de pouvoir répondre techniquement aux exigences du site d’Orthez, et l’indisponibilité des autres pour cause de Covid-19 (on est alors au printemps 2020), le choix s’est vite orienté vers MMC Metal France. « L’idée était de pouvoir optimiser l’usinage de nos têtes sur un inox réfractaire et répondant aux caractéristiques techniques de notre future machine, un Mazak Integrex I250HS avec arrosage haute pression de 70 bars, bi-broches et travaillant jour et nuit ; nous avions donc besoin d’outils extrêmement précis, résistants, aux durées de vie très élevées… et là, Mitsubishi Materials a répondu très vite en mettant en place une équipe dédiée, d’abord au centre technique en Allemagne puis en France pour plus de proximité ».

Genèse d’un projet d’usinage complexe, le projet avec Mitsubishi Materials démarre alors en plein – premier – confinement ; d’abord à distance, en lien avec un des deux centres techniques européens du carburier japonais se situant à Stuttgart (Allemagne), puis de retour en France avec des essais menés par AMValor au sein de l’Ensam de Cluny, à la demande de Julien Legland, technico-commercial MMC Metal France pour la région Sud-Ouest, et Grégory Lafon, ingénieur d’applications. « Nous nous sommes posés beaucoup de questions car il s’agit d’une matière particulièrement résistante et collante ; nous avions à faire à un vrai défi technique », se souvient Julien Legland. « Avec une matière réfractaire – un inox M30NW – difficile à usiner, ce projet a été compliqué à mener, surtout à distance, pour étudier la trajectoire d’outils, la prise de pièce et la mise en forme, ajoute Grégory Lafon. Mais nous avons persisté et nous sommes parvenus à respecter les délais en proposant une solution novatrice. »

>> Perçage du cône dans la tête fémorale

Les essais menés par MMC Metal France avec AMValor à l’Ensam Cluny ont permis de définir les conditions de coupe optimales par la méthodologie du couple outil-matière. Le Groupe Lépine a pu ainsi sélectionner plusieurs outils coupants ainsi que les stratégies d’usinage les mieux adaptées afin d’augmenter la durée de vie des outils et réduire les temps de cycle. « Avec Mitsubishi Materials, nous avons opté pour une solution complète », insiste Nicolas Bruneau. Et d’ajouter : « mon but en tant que Directeur Industriel du Groupe Lépine est de standardiser les bonnes pratiques, afin d’insuffler cette volonté d’améliorer les performances et de travailler en étroite collaboration, voire en réel partenariat, avec les fournisseurs de machines et les carburiers dans ce cas précis sur l’usinage ; ce qui a été mis en place à Orthez et qui a amené ces très bons résultats. Ce travail réalisé sur le site d’Orthez devra donc s’appliquer sur le site de Genay puis dans les autres usines du groupe afin d’harmoniser nos méthodes de travail et nos approches en étant de plus en plus en veille technologique, ainsi que nos process, puis enfin partager les expériences et faire du benchmark permanent entre les sites ».

La tête fémorale est réalisée en deux opérations ; historiquement, la pièce, dont l’usinage était effectué à l’extérieur puis à l’intérieur, pouvait présenter des anomalies ; « nous avions observé une mauvaise tenue lors de la prise de pièce, si bien que l’équipe de Mitsubishi Materials a décidé de procéder différemment en serrant par le cône et non par la tête comme cela se faisait dans le process précédemment, précise Benjamin Amodeo. Dans tous les cas, on peut dire que Mitsubishi Materials a pris en main l’intégralité du process ; c’est un vrai partenaire qui a pleinement pris part au projet. À certains moments, on s’appelait tous les soirs ! ».

À l’origine, deux opérations d’usinage étaient nécessaires ; « la qualité des outils Diaedge de Mitsubishi Materials et la nouvelle stratégie d’usinage, le tout associé à la rigidité de la nouvelle machine, nous ont permis d’adapter les conditions de coupe à nos besoins ; aujourd’hui, une seule opération suffit, à laquelle est combiné du contrôle embarqué… ce qui nous a permis de gagner environ 60% de temps de cycle – dont 50% liés aux nouveaux outils ». À ces gains de temps s’ajoutent des gains en qualité puisque désormais « toutes les anomalies ont été supprimées et l’état de surface procure un effet miroir gage de qualité, attendu et apprécié par nos clients ».

Une gamme d’outils complète pour assurer l’ensemble de l’usinage des têtes fémorales

>> Foret Diaedge MMS Ø12

Les outils Diaedge sélectionnés sont multiples et couvrent tout le process des têtes fémorales. Ils vont des plaquettes ISO pour le tournage – SNMG et VBMT aux forets MMS en passant par les fraises VQ6 coolstar, GW pour le tronçonnage et TCGT pour la semi-finition ; « nous sommes passés de 20 pièces en tournage à 120 avec les fraises VQ6, soit d’importants gains de temps et d’argent avec un ROI rapide ; enfin, notons qu’avec la fraise VQ6 Coolstar rayonnée, nous n’utilisons désormais plus qu’un seul outil au lieu de deux, ce qui réduit les temps de changement d’outil et libère de la place dans le magasin d’outils ».

>> Lame tronçonnage Diaedge GW avec arrosage interne

Quid des perspectives d’avenir ? Depuis 2019, le Groupe Lépine investit massivement dans l’outil de production afin de consolider sa stratégie d’internalisation et de se développer autant sur le marché français qu’au plan mondial (sa production  est dédiée à 50% à l’export). Concernant ce projet de l’unité de fabrication autonome de têtes fémorales, « la machine et le process sont qualifiés, précise Nicolas Bruneau. Nous souhaitons améliorer en permanence nos process de fabrication comme nous avons pu le faire sur l’industrialisation des têtes afin de nous donner les moyens de nos ambitions (à savoir doubler le chiffre d’affaires d’ici 2025) ».

Ce projet n’est qu’un exemple parmi d’autres. Le Groupe Lépine travaille, en effet, à gagner en productivité et en autonomie, à poursuivre l’automatisation des ateliers, à augmenter la taille des lots, … Cela lui permettra de lancer de nouveaux produits. Et concernant le site d’Orthez, cela se traduit par de nombreux projets qui passent par une veille technologique permanente pour « stimuler et  »challenger » nos multiples sites de production. C’est ce qui nous permet d’avancer et de toujours progresser, au lieu de rester sur nos acquis : il faut savoir se remettre régulièrement en question », rappelle Nicolas Bruneau. 

EQUIP PROD • N°138 Septembre 2022