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Vers de nouvelles manières d’usiner les transmissions

SANDVIK COROMANT

par Equip'Prod

La définition de la folie, c’est de faire et refaire la même chose de la même manière tout en espérant de meilleurs résultats. Cela pourrait s’appliquer au taillage de dentures dans la fabrication d’engrenages où le paysage change et où le besoin de réduire les coûts devient de plus en plus pressant. Harish Maniyoor, responsable produits pour l’automobile chez Sandvik Coromant, le spécialiste de l’usinage et de l’outillage, explique comment de nouvelles voies s’ouvrent grâce à trois nouveautés pour l’usinage de transmissions.

Les ateliers d’usinage doivent faire face à des variations de la demande depuis le début de la pandémie. Cependant, quel que soit le contexte, la réduction des coûts reste une priorité. C’est particulièrement vrai dans le secteur du taillage d’engrenages. Les fabricants ont besoin de méthodes plus flexibles pour fabriquer des engrenages, mais cela ne favorise pas toujours la maîtrise des coûts. Traditionnellement, le taillage d’engrenages s’effectue dans des machines spécialisées avec des process très spécifiques, surtout lorsqu’il s’agit de productions en grandes séries. Cela se traduit par des limitations et, souvent, par des coûts élevés. 

Méthode du Power Skiving

>> La fraise à plaquettes indexables CoroMill 180 pour le Power Skiving permet d’usiner des dentures en un seul montage

La méthode du Power Skiving utilise un outil rotatif qui s’engrène sur la pièce afin d’y tailler une denture. C’est un process continu qui permet d’usiner des engrenages en une seule étape. Le Power Skiving combine les techniques du taillage à la fraise-mère et du brochage en veillant à ce que l’axe de l’outil et celui de la denture se croisent selon un angle précis à une vitesse de rotation spécifique afin de favoriser la productivité. 

Cette méthode existe depuis plus de trois décennies, aussi pourquoi est-il intéressant de l’aborder dans cet article ? En fait, les changements dans le paysage de l’usinage redéfinissent la donne dans différents secteurs, notamment la fabrication de transmissions pour les véhicules électriques. Voyons cela plus en détail.

Application dans le secteur des véhicules électriques 

L’idée que les voitures électriques n’ont pas besoin de boîtes de vitesses connaît une remise en cause. Les modèles les plus récents de Tesla et de Porsche sont, en effet, équipés de plusieurs rapports de transmission. Les moteurs électriques peuvent tourner à des vitesses beaucoup plus élevées, de l’ordre de 20 000 tr/min, que celles des moteurs à combustion interne qui sont limités à des vitesses de rotation de 4 000 à 6 000 tr/min. Une boîte de vitesses de réduction est nécessaire pour diminuer la vitesse de rotation des moteurs électriques.

>>  Les transmissions des véhicules électriques doivent supporter des vitesses de rotation élevées et sont donc plus difficiles à usiner

Les transmissions des voitures électriques sont aussi soumises à plus de contraintes en raison de la grande vitesse de rotation, et leur usinage est donc plus délicat. De plus, dans la production de ces pièces, les fabricants doivent maintenir des débits copeaux élevés pour pouvoir produire suffisamment. Par ailleurs, les boîtes de vitesses pour voitures électriques doivent aussi être plus silencieuses car leur bruit n’est pas couvert par celui du moteur. Les pièces doivent donc avoir des tolérances plus serrées, ce qui en complique l’usinage. 

Pour les ateliers, la question est donc de savoir s’il faut privilégier la productivité ou autre chose. La recherche d’un équilibre ne peut se baser uniquement sur les process de fabrication traditionnels. Dans cette optique, la méthode du Power Skiving permet d’usiner complètement les pièces en un seul montage dans des machines multifonctions et des centres d’usinage. Cela permet d’améliorer la qualité et de réduire les délais de production, les manipulations et les coûts logistiques.

L’intérêt de cette approche est devenu évident lorsqu’un grand équipementier automobile en Suède a demandé à Sandvik Coromant de lui proposer une solution d’usinage. Le Power Skiving a été mis à l’étude en collaboration entre l’équipe de développement de la société et Sandvik Coromant. Il est apparu que c’était une méthode intéressante en se basant sur la fraise à plaquettes indexables de Sandvik Coromant, la CoroMill 180, spécifique à ce type d’application. Celle-ci est conçue pour l’usinage productif de cannelures et de dentures.

Pour l’équipementier suédois, le résultat a été un temps de cycle plus court que prévu. Le cahier des charges prévoyait un temps de cycle maximum de 14 minutes par pièce, et le process basé sur le Power Skiving ne nécessitait qu’une minute par pièce. 

Une solution aussi dans le domaine de l’aéronautique

Les avantages du Power Skiving ne sont pas réservés qu’au secteur automobile. Ils sont tout aussi intéressants pour d’autres industries comme la mécanique générale, l’énergie éolienne, l’aéronautique et la robotique. Dans l’aéronautique, la réduction des coûts est très importante. Avec la pandémie de Covid-19, l’industrie aéronautique a enregistré une baisse d’activité importante et Airbus a fait état d’une baisse de la production d’avions de 30%.

Comme pour les voitures, les moteurs d’avions sont désormais soumis à des impératifs de performance et d’économie, ce qui modifie profondément leur production. Dans ce contexte, la flexibilité du Power Skiving suscite un intérêt croissant ; en effet, elle offre plus de latitude aux concepteurs des pièces et il est, par exemple, possible d’usiner des dentures à proximité d’épaulements. Comme les pièces pour les moteurs d’avions sont faites dans des matières tenaces, il est nécessaire d’utiliser des plaquettes plus tenaces que dans l’automobile.

C’est dans cette optique que Sandvik Coromant a mis au point deux nouvelles nuances carbure pour le tournage des aciers ISO P, GC4415 et GC4425. Le nom de ces nuances renvoie aux champs d’application ISO P15 et P25 qui définissent les caractéristiques de l’usinage de ces matières. Ces nouvelles nuances offrent une meilleure résistance à l’usure, une ténacité accrue et une grande résistance thermique. Elles possèdent un revêtement Inveio de seconde génération qui confère la même orientation aux cristaux de la couche d’alumine du revêtement. Les cristaux orientés dans la même direction – ce que l’on peut observer au microscope – forment un bouclier résistant au niveau de la zone de coupe afin de rendre les plaquettes plus résistantes à l’usure et plus durables.

Comme le Power Skiving, les plaquettes dans les nuances GC4415 et GC4425 permettent de mieux exploiter les machines et de réaliser des économies. On voit que les avantages ne sont pas réservés qu’au secteur automobile. Ils sont aussi appréciés dans d’autres domaines comme la mécanique générale, l’énergie éolienne, l’aéronautique, la robotique et dans tous les secteurs qui nécessitent des engrenages. 

Dans tous ces secteurs, les avantages sont l’augmentation des débits copeaux, la possibilité d’usiner des pièces en un seul montage et l’exploitation plus efficace des capacités des machines. Selon Sandvik Coromant, une amélioration de 20% de l’exploitation des machines peut augmenter la marge bénéficiaire brute de 10%. 

Production accrue

Pour profiter de ces avantages, il faut aller plus loin. Pour ce faire, la méthodologie PrimeTurning s’appuie sur une entrée en coupe au niveau du mandrin et sur l’enlèvement de la matière en progressant vers l’extrémité de la pièce tout en assurant de bons débits copeaux. Cette approche autorise l’emploi d’un petit angle d’attaque et permet d’appliquer des conditions de coupe plus élevées. En outre, les outils PrimeTurning peuvent aussi effectuer des opérations de tournage conventionnelles, ce qui offre une grande flexibilité pour les process de tournage.

Selon Sandvik Coromant, il serait possible d’obtenir un gain de productivité de plus de 50% dans certaines applications avec PrimeTurning par rapport au tournage conventionnel. Le logiciel CoroPlus Tool Path facilite la mise en œuvre de PrimeTurning en produisant automatiquement des programmes de commandes numériques optimisés. Qu’il s’agisse du Power Skiving, des nouvelles plaquettes ou de PrimeTurning, ces nouvelles manières d’aborder l’usinage apportent toutes des améliorations aux process et permettent aux fabricants de pièces d’être plus rentables. 

EQUIP PROD • N°136 Mai 2022